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L’enigmatique Rudolf Hess

21 Mars 2008 , Rédigé par Guy Tarade

Le nazisme a sans doute été la dernière épopée magique du 20ème siècle, catastrophe sanglante, dont bien des aspects nous sont encore totalement inconnus, pour ne pas dire occultés.

Le cas Rudolf Hess constitue une de ces énigmes dans laquelle nous aurons beaucoup de mal à découvrir ses détails les plus étranges, les plus sulfureux.

Rudolf Hess est né le jeudi 26 avril 1894, à Alexandrie. Son père Fritz Hess était un homme despotique devant lequel tremblaient sa femme et ses quatre enfants. En revanche, son épouse Klara était une créature douce, effacée qui trouvait dans la spiritualité une consolation à l’étouffante ambiance de son foyer, Rudolf était sans doute son fils préféré.

Le jeune homme appartint à cette race très particulière des « Allemands de l’étranger » que leurs origines, leurs études, leurs amitiés poussaient à réformer le monde par une vision planétaire de la politique. Immergés dans une atmosphère internationale, le poids que la domination britannique les encourageait à une réflexion profonde sur le futur.

Le jeune Rudolf fréquenta le lycée français d’Alexandrie. Dès son enfance, il affronta différentes cultures. Doué d’une remarquable intelligence, il était noté comme un brillant sujet, très doué pour les mathématiques.

Certains de ses biographes prétendent qu’il fut très tôt coopté par l’O.T.O. — Ordo Templi Orientis, société secrète au rôle politique indéniable, mais aussi secte dont le but essentiel semblait être la mise en œuvre la magie opérative. Elle était l’exemple parfait de ces groupes de « magiciens-telluriques » définis par Raymond Abellio, comme utilisant les forces infra ou supra-normales pour obtenir le pouvoir social. Restons prudents face à cette affirmation.

Quittant la terre des pharaons, Hess poursuivra ses études en Europe En Allemagne, à Bad Godesberg, puis en Suisse, à Neufchâtel. Ce fut l’occasion pour lui de constater que dans ce pays où s’harmonisaient trois langues et trois cultures, la profonde unité de l’Europe, enrichie par de fécondes diversités.

Ambitieux, il n’initia aux affaires, puis rejoint Hambourg, où la guerre le surprit. Il venait d’avoir vingt ans. Il s’engagea aussitôt dans l’armée du roi de Bavière — royaume d’origine de sa mère. Deux fois, il fut blessé, dont la seconde très grièvement. Devenu inapte pour l’infanterie, il entra dans l’aviation. L’armistice de 1918 le verra lieutenant aviateur.

Comme pour de nombreux combattants, la défaite le marquera profondément. A l’instar de ses camarades, il sera hanté par la politique. Munich l’attirera car les cercles nationalistes y étaient nombreux.




DE MUNICH A PARIS

Cette ville, qui a reçu les Rose+Croix, les Illuminés de Bavière et les gouvernants occultes de l’IIIe Reich, a quelque chose de magique

Ce n’est pas sans raison que les grandes sociétés secrètes en firent leur centre d’influence et de rayonnement. Placée jadis sur la route du sel, elle conserve encore aujourd’hui, malgré son modernisme, une mémoire des pierres que la folie des hommes n’a pas réussi à faire disparaître après plus de 200 bombardements !. La cité toute entière est parcourue par des influences telluriques puissantes. Dominée par la Frauenkirche, l’église Notre-Dame ses deux tours en briques rouges, hautes de 100 mètres de haut sont l’œuvre de l’architecte Jorg Ganghofer.

Au cœur de l’édifice parfaitement éclairé et sans aucun stratagème, il est possible de faire abstraction de la Lumière. Il suffit pour cela de se rendre à l’entrée de la nef centrale, sous la tribune d’orgue, où se trouve l’emprunte d’un pied : le Teufelstritt, le Pas du Diable. Il détermine l’emplacement d’où l’on ne voit aucune fenêtre, sauf celle qui est située derrière le maître-autel.

Nous ignorons si Rudolf Hess à mis un pied dans l’empreinte de Satan, cependant un fait est certain, c’est qu’il semble avoir abandonné très tôt la foi luthérienne pour fréquenter certaines sectes musulmanes. Esprit curieux de tous les secrets, c’est sans doute au lendemain de la première guerre mondiale, alors qu’il retourna en Egypte régler l’héritage de ses de ses parents, décédés pendant le conflit, qu’il rencontra un jeune Nantais passionné de sciences occultes. Ce dernier l’entrainera à Paris, plus précisément à Boulogne sur Seine, où avec quelques fervents d’occultisme, ils rejoindront un curieux groupe : l’Institut
d’ Euytmothérapie…dont il ne subsiste aujourd’hui aucune ne trace ! Mélange de gourous orientaux et de druides occidentaux, les séances d’initiation avaient dans un hôtel particulier. Les adeptes se nommaientles Veilleurs, tout un programme ! Quelques-uns d’entre eux collaboraient activement à une publication« La Revue baltique ». Fait étrange la couverture s’ornait déjà d’une croix gammée.

C’est dans ces milieux que Rudolf Hess entendit parler pour la première fois des idées nordiques et c’est par eux qu’il découvrit le livre de Ludwig Wilser (1850-1923) « Origine et préhistoire des Aryens »,édité à Berlin en 1899.

L’auteur affirme que le berceau de cette race se trouverait près du cercle polaire. Les glaciations auraient obligé ces peuples à essaimer à travers toute l’Europe. Mais ils conserveraient dans leur inconscient la nostalgie de leur patrie originelle. Comme nous le devinons, cette patrie, à la fois charnelle et mythique porte un nom historique, celui de Thulé. C’est la véritable terre des ancêtres pour les Germains et les Celtes.

Immédiatement, le jeune aviateur vit dans la croix gammée l’image d’un vieux culte solaire, l’emblème majeur d’une communauté de peuple issue de l’Europe du Nord-Ouest. Ce dernier estima que la politique et la religion devaient se confondre. Pour lui, c’était les initiés qui devaient transmuter le monde !


LE GROUPE THULE

Après son séjour à Paris, Rudolf Hess regagna Munich à la recherche d’une société initiatique qui correspondrait à cette foi qu’il venait de découvrir. Tout naturellement, il fréquenta la Société Thulé, véritable creuset au sein duquel fusionnaient des intellectuels épris d’archéologie et d’occultisme. A ses début Thulé était un groupe de recherche ethnographiques, placé sous la direction du professeur Félix Nieder. Elle édita à partir de 1912 une compilation de vingt-quatre volumes : Prose de l’antiquité nordique. La guerre ravagea ses rangs, un grand nombre de ses collaborateurs disparurent dans la tourmente.

Plus tard, trois personnages vont émerger de Thulé : le baron Von Sebottendorf, le professeur Karl Haushofer et le journaliste Dietrich Eckart. Nous savons aujourd’hui que c’est Paul Rohrbach qui introduisit Karl Haushofer au sein de l’organisation. Ce dernier, militaire et géographe réputé, avait effectué de nombreux séjours en Asie, il connaissait l’Inde et surtout le Japon où il fut initié à la philosophie extrême orientale, il pratiquait le Bushido, la règle de vie des Samouraï. Au Tibet, où il avait séjourné, sur le toit du monde, les moines lui parlèrent de la mythique Thulé.

Haushofer inventa une discipline scientifique qui connaît encore un grand succès : la géopolitique. Un jeune disciple qui assistait à ses conférences, données à Munich, sur la Geopolitik, l’impressionna par sa culture. Il s’agissait du Rudolf Hess, déjà très lié à Dietrich Eckart.

La société Thulé n’était qu’une façade. Elle ne se cantonnait pas uniquement dans la littérature et l’ésotérisme. Elle infiltre le monde profane de la politique. Très nombreux sont ses membres qui agissaient au sein du corps franc Oberland. D’autres adhérèrent à un nouveau parti, le Deutsche Arbeiter Partei ou parti ouvrier allemand. Un artiste peintre, ancien combattant, venait d’y entrer. D’origine autrichienne, il reçut la carte n° 7. Sous son impulsion ce groupuscule inconnu ajouta un nouvel adjectif à son nom : national-socialiste.

Vous l’avez reconnu puisqu’il s’appelait Adolf Hitler !

En juin 1920, Hess rejoignit ses rangs, persuadé que Hitler était le seul homme capable d’incarner dans la vie politique allemande son rêve mystique. Il avait alors vingt-sept ans et participa à toutes les actions du parti nazi. Lors du putsch de Munich, le 9 novembre 1923, sa position au premier rang des insurgés lui valut d’être condamné en même temps qu’Adolf Hitler. Tous deux partagèrent la même cellule à la prison de Landsberg. Une amitié profonde naquit entre les deux hommes. Hess fut pour le futur dictateur plus qu’un secrétaire rédigeant Mein Kampf, il était un guide, un maître à penser, considérant son compagnon comme le fondateur d’une nouvelle religion. Il avait découvert son messie !

Le secrétaire d’Adolf Hitler était l’agent de liaison entre le parti national-socialiste et la société Thulé. Il avait naguère coopté pour le mouvement son camarade germano-balte Alfred Rosenberg, devenu rédacteur en chef du Volkischer Beobachter avant d’écrire « Le Mythe du XXe siècle », une œuvre toute imprégnée de haine pour le christianisme. Jérusalem y apparaissait comme l’antithèse de Thulé : un pôle ténébreux !

Thulé a sans doute joué un rôle majeur dans la libération des deux prisonniers, à travers les relations qu’entretenait Rosenberg.


L’ENCHAINEMENT

A sa sortie de prison, en 1925, Hitler relança son parti. Hess devint alors son représentant préféré, son successeur en titre. Il était « le Dauphin ». En janvier 1933, lors de la prise du pouvoir, il fut ministre sans portefeuille, membre du Conseil secret, et aussi Gruppenführer de la SS. Son rôle est encore mal déterminé au sein de l’Ordre Noir, puisqu’il se trouvait théoriquement subordonné au Reichsführer Heinrich Himmler, son cadet. Le seul ciment qui soudait les deux hommes était la croyance dans une patrie commune de tous les Germains, située dans un passé oublié, quelque part dans un Nord Mythique et grandiose. Tous deux estimaient que Thulé se trouvait tout autant dans l’avenir que dans le passé. Au lieu de rêver d’un paradis perdu, ils désiraient construire un nouvel empire. Ils le nommèrent : le IIIe Reich.

Ambassadeur du Führer, dans les années de l’immédiate avant-guerre, Rudolf Hess eut pour mission de présenter, surtout à l’étranger, l’image rassurante d’une Allemagne pacifiste, désireuse d’entretenir des relations de paix et de s’entendre avec ses voisins européens, et spécialement les Français et les Britanniques.

Lorsqu’Adolf Hitler décidera de jeter le poids de ses armes dans la balance, son Dauphin en sera traumatisé. Il le sera d’autant plus que son vieux professeur qu’il admire, le général Haushofer, ne cessera de lui répéter qu’une guerre entre l’Allemagne et l’Angleterre constitue un triple péché : contre la race, contre l’histoire et contre la géopolitique !



LA GENESE D’UNE DESERTION

1936. Lorsque le futur ministre des Affaires étrangères, Joachim von Ribbentrop, fut nommé ambassadeur à Londres, il emmena avec lui Albrecht Haushofer. Le fils du fondateur de la géopolitique fréquentait depuis déjà longtemps les milieux politiques britanniques et organisait la visite de quelques parlementaires de Sa majesté, notamment ceux reçus à Berlin à l’occasion des Jeux Olympiques.

Parmi eux, un homme se détachait, que l’on remarquait immédiatement : c’était le marquis de Clydesdale, qui devint le duc de Hamilton à la mort de son père. Cet aristocrate anglais encore jeune, d’aspect athlétique avait été champion de boxe amateur. Mieux, devenu aviateur, il fut le premier pilote à survoler l’Everest. Lors de son séjour à Berlin, lors des réceptions officielles, il impressionna fortement ses hôtes allemands par son style « dieu du stade ».

Au mois de mars 1938, Albrecht Haushofer fut invité dans son château écossais. Il évoqua toujours avec enthousiasme son ami Rudolf Hess.

LE 10 MAI 1941

Depuis un an la France avait capitulé devant l’armée allemande. L’Angleterre résistait aux bombardements massifs et à des tentatives d’invasions multiples.

Haushofer avait écrit en octobre 1939 :

« Le corps de l’Occident est d’ores et déjà mort ,même si le vêtement extérieur de sa culture est encore préservé. La guerre dans laquelle nous entrons maintenant va également mettre ce vêtement en pièces. Je crains qu’à la fin, cette guerre ne nous convainque, avec dureté que la plupart des gens auraient du mal à imaginer, qu’il n’existe plus d’Europe ni d’Occident… »

Albrecht Haushofer n’avait plus qu’un seul espoir : son ami de toujours Rudolf Hess. Ce dernier à chaque occasion poussait Adolf Hitler à faire des propositions de paix à l’Angleterre.

Grisé par ses victoires sur la Pologne, la Tchécoslovaquie et la France, le führer lui répliquait :

« M. Churchill devrait peut-être me croire pour une fois quand je prédis qu’un grand Empire va être détruit ---un Empire que je n’avais nullement l’intention de détruire, ni même de léser. »

Rudolf Hess prit sa décision de partir pour l’Angleterre, lorsque Hitler lui fit part de son intention d’attaquer l’U.R.S.S. Pour lui une guerre sur deux fronts était une erreur stratégique majeure.

Avec minutie, il prépara sa mission de proposition de paix séparée. Il décida de sauter en parachute le plus près possible du château écossais du duc d’Hamilton et, par son intermédiaire à engager des pourparlers de paix au niveau le plus élevé avec la Grande Bretagne.

Il fit aménager un Messerschmitt 110, transforma le biplace en monoplace et y ajouta deux réservoirs supplémentaires.

Seul son officier d’ordonnance, Karl Heinz Pintsch, était au courant de la mission de l’adjoint du Führer. Il reçut pour mission de remettre lui-même son dernier message à Adolf Hitler.

Le 10 mai 1941, à la nuit tombante, sur l’aérodrome militaire d’Augsbourg, Rudolf Hess prit place dans le cockpit de son appareil. L’avion décolla vers le nord-ouest. Arrivé non loin du lieu qu’il s’était fixé (sans que la DCA anglaise ne tire sur son appareil ou que la flak allemande ne tente de l’abattre) ; non sans mal, Hess sortit de la carlingue et sauta en parachute. Arrivé au sol, il fut capturé par un paysan écossais.

Le dauphin d’Adolf Hitler fut traité comme un prisonnier de guerre et non comme un ambassadeur. C’est en tant que tel, qu’il rencontra le duc d’Hamilton, alors Wing-Commander de la Royal Air Force, et sir Ivone Kirkpatrick, l’expert de Winston Churchill pour toutes les questions allemandes. Sans aucun succès, l’adjoint du maître du IIIe Reich leur répéta de multiples fois sa proposition :

« Que l’Angleterre laisse les mains libres à l’Allemagne en Europe et que l’Allemagne laisse à l’Angleterre une complète liberté dans son Empire.. »

Cinq jours après le début de sa captivité, Hess tenta de se tuer en se jetant d’un troisième étage. Il ne réussit qu’à se fracturer une jambe et le bassin. Il simula alors l’amnésie.

Tandis que Rudolf Hess était enfermé à la Tour de Londres, puis captif à Mytchett Place et enfin à Abergavenny, dans le pays de Galles, son ami Albrecht Haushofer tomba en disgrâce. Reinhard Heydrich, le chef des services de sécurité était persuadé qu’il était l’initiateur de l’acte insensé de Rudolf Hess.

Emprisonné quelque temps, il fut assez rapidement libéré et retrouva un poste de professeur de géographie à l’université de Berlin. Surveillé en permanence, il vécut en reclus.

Compromis dans le complot contre Hitler du 20 juillet 1944, il fut rapidement arrêté et mis au secret dans la prison berlinoise de Moabit.

Alors que la capitale allemande s’effondrait sous les bombardements intensifs de l’Armée Rouge ; dans la nuit du 22 au 23 avril 1945, Albrecht Haushofer fut extrait de sa cellule et exécuté.

Son père Karl qui avait pourtant été, lui aussi et envoyé au camp de concentration de Dachau déclara après la mort de son fils : « Albrecht a trahi son pays et son peuple. »

Le 11 mars 1946 entraînant son épouse dans la mort, il se suicida dans les Alpes de Bavière. Cet admirateur forcené du Japon s’ouvrit le ventre comme un Samouraï !


LE PRISONNIER NUMERO 7

Lors du procès de Nuremberg qui se déroula du 20 novembre 1945 au 10 octobre 1946, Rudolf Hess fut inculpé de crimes contre la paix. De tous les accusés, il fut sans doute le plus digne et le plus courageux, ne reniant jamais son passé. Ses déclarations devant le tribunal ne comportèrent aucune ambigüité.

Le prisonnier s’est pendu, à l’aide d’un fil électrique, dans la prison de Spandau, située dans l’ex Berlin-Ouest , après quarante et un ans de détention, le 17 août 1987. Il avait 93 ans. Pour ses gardiens, il était le prisonnier n° 7

Certains affirment que le mort de Spandau n’était pas le Dauphin d’Adolf Hitler. Les traces des blessures qu’il portait sur le corps ne correspondaient pas à celles de Rudolf Hess, pas plus que certains signes caractéristiques connus de ses proches.

Alors ?

Il restera toujours une énigme derrière cet étrange personnage qui a si fortement marqué le nazisme. Pourquoi Hess a-t-il toujours refusé de voir son épouse ? Quelles raisons l’ont poussé à évincer les visites de son fils Wolf, alors qu’il était détenu depuis plusieurs années ?

L’Histoire nous ment-elle encore une fois ? Peut-être ?


EN GUISE DE CONCLUSION

En 1952, Winston Churchill a écrit:

« Je suis bien content de n’être point responsable de ce qu’à subi Hess autrefois et ce qu’il subit aujourd’hui. »

Il ajouta dans ses Mémoires :

Quelle que soit la culpabilité morale d’un Allemand qui se trouvait si proche d’Hitler, Hess l’avait à mon avis racheté en partie par son acte fanatique de folle charité. »

Gérard Chaville

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